Jeune… Connais-tu la montagne ? Sais-tu ce qu’elle peut te donner ? Connais-tu l’appel qui monte d’elle ? L’appel enchanteur des hauts-plateaux, l’appel âpre des cimes, l’attrait fascinant d’une roche qui se dresse là-haut dans le soleil levant, pendant que la nuit s’écoule dans la vallée. C’est l’appel de la terre aussi cela, dans ce qu’elle a de plus rude et de plus désolé, l’appel de la terre pour elle-même dans sa grandeur sauvage.
Connais-tu les névés étincelants sous le soleil de midi ? Les lacs qui paraissent être un coin de ciel tapi au fond de cratères austères ! Connais-tu l’appel de la cime qu’il faudra vaincre tout à l’heure ?
C’est tout cela que sont allés connaître « quarante de chez nous » au camp J.F.O.M. (Jeunesse de France et d’Outre-mer) de haute montagne à Esteing. Quarante qui, pendant quinze jours, ont compris que la Montagne c’est l’école de l’Homme, celle du Chef ; école de l’effort, école de volonté, école de courage, école de patience, de persévérance, de prévoyance, école d’humilité, mais d’enthousiasme aussi, avec devant soi une idée, une seule… celle du but à atteindre.
Quarante qui ont connu la vie du Refuge à 1 800 mètres d’altitude, tantôt dure, tantôt joyeuse, les corvées de bois, de ravitaillement, les levers à la nuit, les départs à l’aube naissante, les dures montées ou il faut ménager ses forces, le casse-croûte pris au bord d’une source, les passages difficiles où l’attention est constamment en éveil ; les dernières roches que l’on gravit péniblement, le sommet enfin, où la joie éclate ; les retours harassés quelquefois, niais avec quelle satisfaction au cœur…
Quinze jours où notre première pensée s’en alla vers la France en montant ses couleurs. Quinze journées bien remplies, je t’assure.
Jeune ! regarde les images de notre montagne… regarde… et pense. Pense que les quarante qui sont redescendus de « là-haut », ont gardé dans leurs yeux un coin de ciel limpide et dans leurs cœurs un coin de ce granit qu’ils ont gravi. Quoiqu’il advienne, ils ne faibliront point.
Pense surtout que la France nouvelle viendra de la Révolution Nationale, que la Révolution Nationale ne sera point sans l’Homme Nouveau et que l’Homme Nouveau ne naîtra point en toi si lu n’as la volonté farouche de l’effort que tu dois faire en toi, sur toi, autour de toi.
A. G., Camp d’Esteing, 1941. Franc-Jeu, 25 octobre 1941