Le camping à la portée de tous

Une vie saine et de la joie.

Quitter la grande ville, ses poussières et son tumulte, pour gagner, par le train au l’autocar, un coin champêtre, en pleine campagne, où vous passerez la nuit sous la teinte, où pendant un jour ou deux vous donnerez à votre organisme, au contact d’un air vivifiant, une réaction salutaire, véritable cure de désintoxication, où votre esprit trouvera dans l’incomparable spectacle de la nature offerte à vos yeux un enchantement merveilleux, c’est là une joie profonde, un plaisir tonique que chaque semaine goûtent maintenant, sans cesse plus nombreux, des centaines et des centaines des nôtres.

Eh oui, le camping est en marche !

Il y a encore cinq ans on regardait avec curiosité, comme un original, celui qui le pratiquait. On détaillait le personnage, du sac aux galoches, avec quelque indiscrète ironie. Un nudiste. Ou un végétarien. Et de sourire…

Mais en 1934 la cohorte des campeurs s’est faite plus dense encore qu’en 1933. Elle a augmenté dans des proportions considérables en 1935, dans des proportions énormes en 1936. La semaine des 40 heures aidant, elle va grossir, dans les mois à venir, comme les eaux d’un fleuve en crue.

Il n’est pour s’en convaincre que d’assister aux vibrants exodes des samedis soirs de ce mois de mai, près des gares ou aux portes de la capitale.

Sans doute un certain snobisme n’est-il pas étranger à ce que d’aucuns baptiseront « une mode ». Mais si snobisme il y a tous ceux qui, comme moi, ont déploré des années durant que les Français soient rétifs à ce sport démocratique par essence ne s’en plaindront pas. Au contraire !

Le camping qui demande du sérieux, des efforts physiques légers, mais réels et de la suite dans les idées a tôt fait de lasser ceux qui prétendent souscrire à sa vogue.

Qu’est-ce donc que camper ?

Vous ne pouvez pas camper ? Mais si. Madame !…

C’est tout simplement, comme l’a si parfaitement écrit M. Jean Loiseau, dans son « Manuel du camping », l’art de vivre sainement, au grand air, en couchant la nuit sous un abri portatif, la tente.

C’est à la fois un délassement et un sport. Un délassement parce qu’il permet un isolement salutaire à ceux que cinq jours de vie trépidante sur sept dans la collectivité du travail surmènent (le campeur, sous sa tente, est dans sa maison). Un sport parce que sous presque toutes ses formes (à pied, à vélo, en canoë) et à tous instants il fait participer le cœur, les muscles, les poumons à un exercice excellent sans toutefois prendre les aspects de la compétition, de la course au record ou de la « championnite », cette maladie qui a trop conduit et conduit encore des individus non préparés ou non doués à des efforts dont leur organisme accuse parfois dangereusement les effets.

Le camping est donc à la portée de tous. Il peut être pratiqué par tous.

Hommes, femmes, enfants, à n’importe quel âge, peuvent et doivent camper.

Le camping n’est certes pas difficile, mais il ne faut pas tomber dans l’excès de croire que, du jour au lendemain, sans conseils et sans méthode, on puisse deve­nir un campeur habile et entraîné, tirant de ce sport toutes les satisfactions promises.

Il faut savoir comment camper. Il faut savoir choisir sa tente et son matériel.

Partir à l’aveuglette, sans but précis et à demi équipé, c’est aller au-devant de déceptions certaines.

A pied, à vélo, à moto ?

On peut camper ’en camp fixe, c’est-à-dire dans un site dont on ne bougera pas durant toute la durée du séjour hors de •la ville. On peut camper aussi en baladeur, c’est-à-dire en randonnant sans cesse pour ne s’arrêter qu’aux heures de repas ou pour le coucher.

Les moyens de locomotion sont multiples.

D’abord le plus simple, grâce au moteur humain : la marche à pied.

Puis le vélo, le tandem, la triplette, la moto, le side-car, l’auto, l’avion, le cheval, le canoë.

Le camping à pied, si vous êtes solide sur vos jambes, est peut-être le plus agréable de tous. Un célibataire, un jeune couple peuvent s’y livrer en randonneurs. Avec un enfant, il est encore possible, votre tente étant plantée, en camp fixe, à une distance raisonnable d’une gare ou d’une station d’autocar.

Mais pour camper, pour dormir en plein air et y prendre ses repas, il faut une tente, c’est-à-dire un abri efficace, du matériel de cuisine et des objets divers indispensables.

Nous verrons tout cela dans notre prochain article.

René MAINE – Paris-Soir, le 9 Mai 1937

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