Le jamboree de Gödöllö est en quelque sorte le triomphe du camping.
Nul n’ignore, certes, que les scouts sont de fervents adeptes de ce sport et le pratiquent depuis des années avec un enthousiasme grandissant. Mais les organisateurs de la réunion scoute mondiale actuelle ont voulu que le jamboree tourne autour de l’idée du camping.
Il est certain que de tous côtés s’élèvent des camps dont l’exécution a été poussée avec un souci méticuleux du confort et de la vie agréable sous la tente. Ce grand rassemblement nous est très profitable à tous. Il nous montre des tas de choses que nous ignorions en France et dont nos scouts vont faire leur profit. Car nous circulons tous ici, appareil de photographie ou carnet de notes en main, de façon à faire une ample moisson de trucs et d’astuces.
« Combien de tentes sont-elles montées ?
— Nous n’avons pu les compter, mais il doit y en avoir au moins 5.500 à 6.000 qui abritent au total 25.000 scouts de 43 pays. »
Les Hongrois ont magnifiquement préparé les installations durant des mois de travail. Tout a été construit par des scouts : les routes, l’installation de l’eau potable, le téléphone, l’électricité, les haut-parleurs qui diffusent les indications et la musique dans tout le camp, les services sanitaires comportant postes de secours, ambulances, hôpitaux où veillent en permanence plusieurs médecins et chirurgiens… Tout ce qu’il faut pour assurer la vie d’une ville de 25 .000 âmes a été magnifiquement prévu et réalisé ici.
Et toute la journée, ce sont de grandes bandes de garçons qui circulent en chantant et en riant à gorge déployée… en allant d’un camp dans l’autre. La politesse internationale a certains rites que l’on respecte d’un pays à l’autre : invitations à déjeuner et à goûter, échanges de renseignements, initiations aux coutumes locales…
Et il est extraordinaire de voir tous ces garçons qui ne se connaissaient pas voici quelques jours à peine être devenus ainsi et si rapidement de si bons et si véritables amis. Car c’est l’un des miracles du jamboree de transformer cette foule d’enfants de toutes races et de toutes nations en une foule d’amis sincères. L’explication se trouve, dans un fait que signalait Baden Powell l’autre jour : la formation de tous ces jeunes est commune et elle se trouve dans la loi scoute qui est la même pour tous.
On l’a fort bien senti au cours des séances du Congrès International de chefs qui vient de se tenir et dans les séances duquel les chiffres communiqués ont montré amplement que le mouvement scout était en période d’augmentation et que, malgré cette augmentation d’effectifs, la profondeur de l’idéal restait intangible.
Et le sport que l’on pratique ici sous toutes ses formes : cheval, canoé, marche à pied, course, jeux de ballons, hockey, rame, natation, trouve son compte, je vous l’assure, à cette joyeuse compétition qui a comme but final une vie intense, dégagée de tout ce qui peut l’étriquer, la diminuer, la rabaisser. Il semble, à voir cette population de jeunes, que Baden Powell a parfaitement réussi dans ses désirs.
Notre contingent français tient fort bien sa place à tous les points de vue. Il n’a pas été organisé de concours à proprement parler. Mais le Régent de Hongrie, Lord Baden Powell, le comte Teleki, chef de camp, visitent les installations et il faut que l’on se montre digne de la tradition des camps passés…
C’est pourquoi tout le monde s’est mis au travail avec enthousiasme et a en quelques jours construit un camp dont le confort et la présentation ne laissent rien à redire : tables, bancs, lits, hamacs, cuisines et salles à manger… tout est digne de recevoir des visiteurs de marque sans bluff inutile et sans tape-à-l’œil qui n’a pas cours dans les milieux scouts.
Le Ministre de France qui est venu plusieurs fois au camp n’a pas caché son admiration pour nos quartiers et il a dit sa joie d’avoir pu ainsi se rendre compte par lui- même de ce fait que le scoutisme français comparé aux mouvements des autres nations peut parfaitement se dire heureux des résultats qu’il obtient.
André Reval. Match, le 22 aout 1933