L’existence des mouvements spécialisés d’usagers des Auberges ne se justifie plus actuellement ; en effet, qu’entend-on par « usager des Auberges » ?
L’usager des Auberges, c’est celui qui utilise les Auberges de Jeunesse au cours de ses sorties du dimanche et des vacances ; c’est aussi bien le scout que l’Ami de la Nature, que le jeune inorganisé.
Les chiffres de fréquentation à ce sujet parlent avec une singulière éloquence :
Parmi les organisations françaises dont les membres fréquentent les Auberges de Jeunesse, Tourisme et Travail et les Amis de la Nature viennent au premier rang, alors que les mouvements spécialisés d’Auberges de Jeunesse ne totalisent qu’un infime pourcentage.
En 1938-39, le Centre laïque des Auberges de la Jeunesse comptait 35 000 membres ; il était alors un organisme gestionnaire et un mouvement de jeunesse puissant. C’est grâce à des crédits suffisants et à un intérêt marqué du Gouvernement d’alors que cet essor fut possible. L’avènement du Front populaire et les efforts conséquents de Léo Lagrange furent à la base de ce succès.
Aujourd’hui, il est symptomatique que les usagers des Auberges ne soient plus les « Ajistes ». Les mouvements spécialisés, en effet, ne peuvent plus assurer la gestion d’Auberges de la Jeunesse de façon cohérente d’une part, et d’autre part ils n’apportent à leurs membres rien qui les différencie des autres mouvements
L’« Ajisme » se voulait éducatif et il paraît que là était sa caractéristique essentielle (l’AJ, ouverte à tous, mais les « Ajistes » formant les cadres, les meneurs de jeux, les éducateurs des jeunes qui la fréquentaient) ; dans la pratiquer les Ajistes se révélèrent souvent moins adaptée et moins éduqués que les camarades des autres organisations.
Enfin, l’« Ajisme », tout en se défendant d’être un idéal, une conception complète du monde s’exprimait comme une doctrine. Combien n’a-t-on pas rabâché les idées d’« esprit ajiste », d’« idéal ajiste », de « discipline ajiste ». C’est pour cette raison que les mouvements spécialisés se sont isolés de la masse des jeunes.
Michel BUROLLAUD. Ami de la Nature, janvier 1952