Voici déjà l’automne…
Finis les longues siestes au soleil et les camps-baignades. Le thermomètre baisse. La route s’étire. Novembre allonge les randonnées. Il ne fait ni trop chaud, ni trop froid. Les pluies sont rarement persistantes. C’est l’heure de « voir du pays ».
MARCHONS ! Tous nous marchons depuis notre enfance. Mais pourquoi certains considèrent-ils une promenade de 5 kilomètres comme une expédition, alors que d’autres accomplissent des étapes de 30, 35 kilomètres et plus sans trouble et sans peine.
Entraînement ? Dans une très faible mesure. Equipement ? Oui, mais ce n’est pas une raison suffisante. (Nous reverrons bientôt cette question en détail.) Technique ? Là est la raison. Comme il existe une technique de la nage, il y a une technique de la marche. L’immense majorité des hommes et des femmes — surtout les femmes — ne sont que des « piétineurs », comme d’autres ne seront éternellement que des « barboteurs ». Ils ne savent pas marcher.
Voici à leur adresse des éléments qu’ils devront essayer de mettre en pratique (nous les supposons aujourd’hui bien équipés et bien chaussés).
LE PAS. — Ne posez pas la pointe du pied la première sur le sol. Ne posez pas non plus le pied à plat comme les canards. Mais attaquez légèrement du talon et développez complétement le pied. Faites jouer toutes les articulations, tous les muscles. On compte une quarantaine d’os dans un pied : ils sont là pour servir, tous. Il faut à la fin de chaque pas se sentir réellement propulsé en avant. Vous irez vite et sans fatigue.
LE RYTHME. — La marche doit être régulière, plus ou moins rapide suivant les terrains, mais, du départ à l’arrivée, toujours à la même cadence. Les pas doivent être égaux, assez allongés sans exagération mais d’autant plus allongés que vous êtes chargés. Un pas d’homme de taille moyenne, chargé d’un sac à dos bien arrimé pesant une quinzaine de kilos, est de 70 centimètres environ. Respirez profondément, calmement et toujours au même rythme accordé à la cadence des pas. Vous éprouverez alors un bien-être exceptionnel. Dans ces conditions, la marche, loin de fatiguer, fortifie de nombreux muscles, assouplit tout le corps, régularise le cycle cardio-pulmonaire et équilibre le système nerveux.
LE SECRET DES LONGUES RANDONNEES. — Ne jamais forcer sa cadence. — Chacun de nous a son allure propre, fonction de son poids et de la longueur de ses jambes. Les uns absorbent 6 kilomètres dans l’heure ; d’autres peinent, sur la même route, en en couvrant 4. Cette question de cadence est trop peu souvent envisagée lors de la constitution d’équipes de randonneurs.
Faire une halte, tous les 10 kilomètres environ sur route plate, tous les 5 kilomètres en terrain varié. Ne jamais s’arrêter au milieu d’une côte, mais au sommet.
Alimentation : Le matin au départ, manger convenablement des aliments chauds, reconstituants et peu bourratifs : bouillies chocolatées, tartines beurrées, œufs, etc. En cours de route, « grignoter » assez souvent, peu à la fois, des denrées énergétiques sous un petit volume : sucre, chocolat, fruits séchés… Boire le moins possible : jamais de bière ni de boissons fortement alcoolisées, mais thé chaud, vin léger, etc.
Ne vous « claquez » pas, histoire d’épater les petits camarades. Si vous êtes fatigués, n’ayez pas honte de demander la pause : vous leur rendrez service, à eux aussi… La randonnée n’est pas une course contre la montre, mais un plaisir vivifiant.
Allez… Ne pensez plus à vos pieds. Ouvrez vos yeux et vos oreilles. Le monde vous accompagne !
J. BEZOUT. Camping-plein air : revue illustrée, novembre 1946