Que sommes-nous, vivants, sur notre coin de terre
Où nous faisons claquer notre fouet orgueilleux ?
Rien de plus qu’un troupeau de riches et de gueux;
Mais nous continuons la chaîne séculaire ;
Et demain, nous serons mêlés à la poussière
Faite des ossements et du sang des aïeux.
Songeons-nous, aux labours, quand de nos doigts caleux
Nous brisons une motte au coutre réfractaire,
Songeons-nous que depuis les Gaulois seulement
Le chiffre qui pourrait faire un dénombrement
De tous nos morts, serait un chiffre formidable ?
Si nous n’y songeons pas, en secret, une voix
Nous fait aimer ce sol dont chaque grain de sable
Contient un peu de ceux qui vivaient autrefois.
Pierre Préteux. La Revue Normande 01 janvier 1936